Accompagner le Bien-Être et la Reconnection au SOI

Instant de vie - Départ
Monsieur, me voilà à nouveau dans cet espace où la communication se fait dans le silence.
La vie était devenue lasse pour vous, soumis à des contraintes médicales sans possibles meilleurs.
Et pourtant, les sourires et remerciements échangés lorsque le calme se réinstallait en vous, trahissaient ce désir de croire qu'il y avait encore du bon à vivre.

Vous n'étiez pas là depuis bien longtemps, mais nombreuses nous étions à apprécier cette connivence qui se renforçait lors de nos brefs échanges.
Pas de faux semblant, pas de masque, la relation était de celle que je chéris, vraie et sincère.

Vous êtes parti si brusquement, c'était si inattendu que je n'ai pas eu le temps de vous dire merci, merci pour cette rencontre, merci pour votre confiance, merci pour votre patience aussi.
Bon voyage de retour et belles retrouvailles que vous attendiez.

Francine Raulet
Mai 2016

Etincelle de vie au coeur du passage

 

C’était ce vendredi, j’étais venue vous refaire vos trop nombreux pansements, multiples scalps, témoins de votre grand besoin de liberté ou d’une trop grande demande d’attention.

Pourquoi, trop ? Vous étiez si seule, et nous étions là, semble –t-il.
Plus attentif, plus présent, qui sait si vous ne vous auriez pas moins abimé ces derniers jours ?
Que de souffrances en vous, vous aviez choisi de ne plus parler, de si rarement manger.

Vous attendiez le départ.
Restait alors votre sourire, et vos grands yeux pleins de demandes d’amour et de sollicitudes, d’interrogations et parfois de peur.

Avant de quitter votre chambre, alors que je vous réinstallais devant votre table, vous laissant seule dans l’attente de votre petite fée du jour, qui allait remettre de l’harmonie dans votre corps en dérive, vous parant de votre tenue du jour, vous m’avez pris les deux mains. J’ai vu votre tête se pencher péniblement vers elles, et avec émotion, y avez déposé un baiser empli de gratitude.
Avec un sourire, j’ai croisé votre regard, je vous ai caressé la joue, remis vos cheveux en place un peu derrière les oreilles et vous ai évoqué la suite de votre matinée.

J’ai repris mon chariot, pris la direction de la porte de votre chambre. Je ne savais pas encore que ce serait votre au revoir, acceptation de ce qui allait arriver.

Je n’ai pas été surprise d’apprendre votre départ le lendemain. C’est bien entouré que vous avez quitté votre souffrance, pompiers, médecin du Samu, infirmière, petites fées.
Je suis passée vous voir ce lundi matin, avant de rejoindre mon chariot de soin pour une nouvelle journée. Vous étiez si paisible, touchante, si présente encore.
J’ai touché une dernière fois votre joue.
Malgré la froideur, la rigidité, vos paupières closes, il y avait encore cette part de vous qui illuminait vos yeux lorsque le jour s’éveillait certains matins.
Vos petites fées avaient glissé dans vos bras votre peluche, qui vous accompagnait chaque soir, dans le silence de la nuit.

Bon voyage belle Âme, dans mon cœur, dans mes pensées vous êtes.

Francine Raulet
Avril 2015

 

Vous avez choisi Madame de partir ce midi.

 La journée s’annonçait ordinaire si tant est que ces journées en maison de retraite médicalisée puisent être sans surprises.

 Comme souvent ces derniers temps, lasse de votre situation, vous l’aviez ce matin encore évoqué, à votre petite fée qui avait pris soin de vous, avant de descendre à votre séance de kinésithérapie : aujourd’hui, je veux partir.

 

Tout a basculé si subitement, votre corps s’est affaissé sur votre fauteuil, la conscience déjà hors du bâtiment, le souffle presque inaudible, votre regard  n’était plus, seule une petite lueur a persisté le temps de mettre en oeuvre les premiers gestes pour tenter l’impossible.

Réflexes de survie, pour oser croire que la vie va restée là, encore un peu.

 

Energie décuplée pour vous sortir du fauteuil et vous déposer au sol.

Tout va très vite, appel à l’aide des collègues, je croise des regards d’impuissance chez certains moins accoutumés à l’urgence alors que je veux croire à un possible.

 

La jeune étudiante qui appuyait consciencieusement sur le ballon chargé délivrer l’oxygène de la vie, a vu votre lueur s’éteindre et la pâleur s’installer :

• Restez là Madame, vous a-t-elle soufflé à plusieurs reprises …

 Vous avez lacher prise, sans bruit.

 

Nous restons tous soudés dans l’espérance. Tristesse et stress se mèlent à l’incrédulité.

• Elle part, elle n’est plus là, a-t-elle poursuivi alors que nous nous affairions à effectuer ces gestes parfois maintes fois éprouvés.

Y croire, y croire encore malgré l’évidence.

 

Tant d’Amour circule à cet instant, comme pour vous dire de revenir, qu’il y a encore à vivre, comme pour vous dire aussi peut-être, n’ayez pas peur, vous pouvez partir, ce que vous déciderez sera le mieux, pour vous... 

Votre âme avait choisi ce vendredi midi de repartir.

Il nous faut lâcher nous aussi, accepter notre peine, notre vulnérabilité, et revenir à notre réalité.

Merci Madame, au revoir et bon voyage de retour vers la Lumière.

Francine Raulet – Mars 2015